La famine généralisée ou la guerre saoudienne au Yémen

28.10.2016
Cette guerre a été décidée depuis deux ans par l'Arabie saoudite et une petite coalition d'Etats arabes recrutée parmi les pétro-monarchies et leurs clients. Elle bénéficie de l'aide de conseillers militaires américains et britanniques. A ce jour elle a fait au bas mot plus de 10.000 victimes dont 4.000 civils.

Dans un article du 16/10 auquel nous renvoyons, « Agression américaine au Yémen » nous avions fait un brève historique de cette guerre, en y rappelant le rôle de l'Arabie saoudite.

Officiellement,la guerre est présentée par l'Arabie comme devant éliminer une rébellion houthi soutenue par l'Iran, rébellion se disant chiite, alors que les Etats de la coalition se revendiquent du sunnisme. Mais il ne s'agit en aucun cas d'une guerre religieuse, même si ce facteur compte.. Pour le Royaume, il s'agit de conquérir définitivement un Etat limitrophe jusqu'ici indépendant, en vue de s'approprier ses ressources et y exporter ses produits.

Pour les États-Unis, outre un soutien à l'allié saoudien, il s'agit d'éliminer l'influence iranienne de la région, prétendue servir à terme les intérêts russes. Mais il s'agit surtout de maîtriser cette partie de la corne de l'Afrique, considérée comme essentielle à leurs échanges militaires et commerciaux.

Or les informations récentes provenant de la zone de guerre montrent que pour affaiblir l'adversaire, et conquérir l'ensemble du Yémen, le Royaume saoudien a décidé d'anéantir toute résistance en affamant, au sens propre, la population yéménite.
Non seulement il multiplie les frappes contre des cérémonies funéraires, des marchés et hôpitaux présentés comme des objectifs militaires, mais dorénavant ces frappes visent le bétail, les fermes et les champs de sorgho, indispensable à la fabrication du pain, principal aliment de la population. Il est clair dorénavant que les saoudiens veulent détruire le petit secteur agricole du Yémen, soit 3% de la superficie totale, l'essentiel du territoire étant constitué de déserts. Ainsi, face à la famine grandissante, les yéménites seront obligés entre autres, d'importer de la nourriture achetée aux Etats du Golfe.

Selon un rapport provenant du ministère de l'agriculture de la capitale, Sana'a, 550 bombardements dans les 20 provinces, ont ciblé des fermes, des troupeaux, des réservoirs d'eau, des magasins de produits alimentaires, des banques agricoles des marchés et des camions de transport de vivres. La lutte contre les Houthis n'a manifestement rien à y voir.

Il en résulte que la sous-alimentation, comme de plus en plus les famines, touchent dorénavant l'ensemble de la population yéménite. Des photographies de victimes squelettiques commencent à circuler dans les pays riches. Mais dans ces mêmes pays, dépendant lourdement du pétrole saoudien, il ne vient à personne la volonté d'empêcher la poursuite de ces véritables crimes de guerre.

Aucune guerre jusqu'à ce jour ne visait explicitement l'anéantissement des populations civiles - sauf sans doute les bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki. Les Etats occidentaux,en premier lieu la France, traitent de crimes de guerre les bombardements syrien et russe à Alep, au prétexte des morts collatérales civiles en résultant. Mais ils ne s'aviseront pas de traiter l'Arabie saoudite de la même façon. Ils partagent trop ses intérêts.