DISCOURS DE CLÔTURE DE LA MANIF POUR TOUS, PAR LUDOVINE DE LA ROCHERE
"Chers amis,
Depuis 2012, nous nous sommes levés pour dire non au « droit à l'enfant ». Malgré les dénégations de Madame Taubira et d'autres, nous savions pertinemment que le mariage implique la filiation et donc, en l'occurrence, la PMA sans père et la GPA. La loi Taubira est un engrenage et nous sommes pris dedans. Nous sommes au cœur. Nous avions dit que le mariage impliquant le droit à l'adoption, cela impliquerait de nouvelles revendications sur la filiation : la PMA sans père puis la GPA. Les faits nous donnent manifestement raison.
Bien entendu, au lieu de reconnaître que nous avions raison, nos opposants cherchent à nier la réalité. Certains osent ainsi nier que la GPA ne serait pas la suite de la PMA sans père. Ce n'est pas le cas de Caroline Mécary, fer de lance de la déconstruction de la filiation, qui reconnaissait elle-même hier soir sur un plateau télé que la GPA va avec la PMA sans père. J'ajoute que derrière ses habits de juriste, Caroline Mécary est une politique, élue, membre du groupe socialiste au Conseil de Paris.
Nos opposants continuent, plus que jamais, à refuser le débat, le cœur du débat, à savoir les besoins de l'enfant. Leur seul argument : nous faire passer pour des « dogmatiques », des « extrémistes » et autres sottises : tenter de disqualifier est leur seule méthode. Pourquoi ? Parce que le « droit à l'enfant » est en vérité indéfendable ! Qui peut justifier de fabriquer volontairement un orphelin de père ? J'ajoute que lorsqu'ils parlent d'égalité, c'est toujours du point de vue des adultes, jamais celui des enfants.
Mais quelle que soit leur méthode, nous ne lâcherons rien et maintenant, moins que jamais : la PMA sans père, annoncée par Marlène Schiappa, serait une injustice indigne de notre pays, ce serait la création d'une inégalité inouïe pour les enfants : comme l'écrivait hier la sociologue Nathalie Heinich, « Entre un enfant qui peut dire « mon papa » et celui qui ne le peut pas, n'y a-t-il pas plus criante inégalité » !?
Sur France 5 hier soir, Monsieur Castaner, porte-parole du gouvernement, indiquait qu'il y a discrimination pour la PMA parce que, d'après lui, elle ne serait pas ouverte à tous. C'est faux, c'est absolument faux : la PMA, qui est un acte médical, est ouverte à toutes les femmes, à tous les couples qui souffrent d'une pathologie de la stérilité médicalement constatée. Oui, Monsieur Castaner, il y a des conditions qui entourent l'accès à la PMA : bref, montrer qu'il y a une infertilité médicale. Et toutes les conditions contribuent à justifier le besoin d'une assistance médicale à la procréation. Il n'y a donc aucune discrimination ni une quelconque inégalité devant l'accès à la PMA, dès lors que son accès est conforme à ce qu'est précisément l'Assistance Médicale à la Procréation.
La PMA sans père ferait sciemment, volontairement, délibérément des orphelins de père. Une injustice inouïe ! Une injustice indéniable : être privé de père, ou de mère, est un vide, une absence terrible, une « abîme », selon les mots de certains. Que des accidents de la vie rendent des enfants orphelins est une chose, mais instituer la conception d'orphelin de père est tout autre chose. Qui acceptera de rendre des comptes demain à une génération d'enfant sacrifiés, car fabriqués orphelins avant même leur conception et leur naissance ?
Cette forme de PMA, en outre, ferait des enfants de père inconnu : elle priverait de la filiation paternelle, de la connaissance complète des origines : l'enfant ne saura pas de qui il est né, de qui il procède. Il lui manquerait, autrement dit, une part de son identité, identité dont il a éminemment besoin pour se sentir des ailes et se lancer dans la vie.
Certains évoquent, à juste titre, les difficultés bien connues des familles monoparentales, difficultés éducatives, scolaires, économiques, etc. Ce sont en moyenne les familles les plus pauvres, et c'est l'honneur de notre pays que de veiller en particulier sur ces familles. Mais faut-il créer sciemment des familles monoparentales en ouvrant la PMA aux femmes célibataires ? D'autant que dans ce cas, contrairement aux familles monoparentales que nous connaissons, les enfants ne sauraient pas qui est leur père et ne pourraient avoir aucun lien, aucune relation, avec lui.
La PMA sans père serait un détournement de la médecine à des fins sociétales. Ce serait l'ouverture de la boîte de Pandore : il y aurait ensuite, évidemment, trafic de gamètes, trafic d'embryons, GPA, etc, comme c'est déjà le cas dans certains pays. Contrairement à ce que certains pensent, le saut anthropologique, le franchissement de la frontière entre respect de l'Homme et manipulation de l'Homme commencerait avec la PMA sans père. Quant à la GPA, elle en serait la suite inéluctable. Ouvrir la PMA à des femmes qui veulent se faire faire des bébés en laboratoire avec du sperme anonyme revient à piétiner le besoin de l'enfant de se situer dans une généalogie, à faire disparaître les droits de l'enfant au profit d'un prétendu « droit à l'enfant » La PMA sans père revient à considérer que les enfants n'ont pas besoin de pères. Elle revient en outre à considérer que les femmes n'ont pas besoin d'hommes : elles n'auraient besoin que de pourvoyeur de sperme !
Nous nous demandons souvent quelle planète nous laisserons à nos enfants, mais pensons aussi aux enfants que nous laisserons à la planète et aux générations futures. Comme le dit le proverbe, « on ne peut donner que deux choses à ses enfants, des racines et des ailes ». Parce que l'avenir est là, nous leur devons l'un comme l'autre. Face à ces immenses enjeux humains, et civilisationnels, le débat annoncé sera infiniment plus complexe que Marlène Schiappa ne l'imagine. La secrétaire d'Etat, de fait, semble n'en avoir aucunement conscience. Oui, si le débat devait effectivement s'ouvrir, il n'est pas dit, loin s'en faut, que Marlène Schiappa et ses amis obtiennent gain de cause car les Français ont le sens de la justice, et surtout pour les enfants !
Et en ce qui concerne la PMA sans père, l'agence de la biomédecine y est opposée, le CCNE est divisé, le gouvernement est divisé (M. Gérard Collomb a déclaré aujourd'hui dans le Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI que la PMA sans père n'était pas une priorité et qu'il préférait lutter contre le chômage. Nous ne pouvons que saluer la sagesse de tels propos, prémices d'un abandon souhaitable du gouvernement à passer en force sur ce sujet), les partis sont divisés... et les Français y sont très opposés : 77% d'entre eux, soit près de 8 sur 10 - c'est énorme ! - pensent que « L'Etat doit garantir à l'enfant né par PMA le droit d'avoir un père et une mère ». Quant à la GPA, les Français y sont encore davantage hostiles, scandalisés devant une pratique intolérable qui réduit l'enfant à l'état d'objet et institue l'asservissement des femmes, bref, un nouvel esclavage aussi lucratif qu'intolérable. Et pas seulement en France. Si l'on considère que la GPA doit être interdite, il faut non seulement empêcher la régularisation en France des GPA réalisées à l'étranger mais aussi s'engager pour obtenir l'abolition universelle de la GPA. La dignité des femmes et des enfants n'a pas de frontière !
Oui, pour les droits des enfants, contre la PMA sans père et la GPA, nous sommes très largement majoritaires, en dépit de ce que croient certains. Par ailleurs, nous avons empêché la légalisation de la PMA sans père durant tout le quinquennat de François Hollande et ce, dans le contexte d'une majorité autrement plus solide que celle d'Emmanuel Macron aujourd'hui. Il n'y aucune raison de ne pas parvenir à protéger les droits de l'enfant dans les années qui viennent ! Et ne pensez pas que les dés du débat seront pipés. Ce serait un piège terrible, un mauvais prétexte de renoncement à défendre les droits de l'enfant : ne nous laissons pas impressionner par quoi que ce soit, pas même par les risques et les difficultés. La semaine qui s'achève a clairement montré au Président de la République que sur cette question de la filiation, il n'y a pas de consensus. La raison voudrait d'en tirer les conclusions qui s'imposent. Après les vifs débats qui avaient marqué le début de son quinquennat, François Hollande avait eu la sagesse de ne pas réveiller les passions et diviser les Français en passant en force sur la PMA sans père et le GPA. C'est un exemple à suivre pour Emmanuel Macron qui souhaite plus que tout rassembler les Français. Il ne tient qu'à lui de se sortir du piège sociétal tendu par sa secrétaire d'Etat. Depuis quelques jours d'ailleurs, nous voyons bien le malaise de ceux qui défendent un prétendu droit à l'enfant. Ils tournent autour du pot, ils n'osent pas nommer les choses en vérité, ils contestent le fait qu'il s'agit de créer un « droit à l'enfant », et pourtant c'est bien de cela dont il s'agit !
Nous avons donc devant nous un travail immense pour protéger les enfants, leur lien et leur relation avec leur père. Pour les générations d'enfants à venir, nous allons tous devoir nous investir. Et le programme de notre mobilisation s'annonce dense : réfléchir aux enjeux, alerter des implications et conséquences, participer aux débats, éveiller les consciences, décrypter les informations, réaliser et diffuser des mails, des vidéos et des campagnes de communications, appeler à la générosité pour financer nos actions... et peut-être même manifester. J'espère, cependant, que nous n'aurons pas à en venir là, et que la raison prendra le dessus sans tarder du côté de l'Elysée et de l'Hôtel Matignon. Mais je puis assurer que toutes nos équipes opérationnelles sont prêtes à agir si nous devions retrouver le chemin de la rue. Chacun de nous a sa part de responsabilité, chacun de nous peut et doit apporter une aide, quel que soit son agenda, ses obligations, ses occupations. Les uns donneront tout leur temps, d'autres ne pourront donner que quelques heures de temps en temps, d'autres encore nous donneront les moyens matériels, une manière aussi très importante de participer à ce combat.
Ensemble, nous pouvons, nous allons empêcher le lancement de la fabrique d'enfants nés de père inconnu. Oui, grâce à l'engagement de chacun d'entre nous au sein de notre grand mouvement social, nous remporterons de nouvelles victoires. Pour les enfants et pour la société, vive la paternité, vive la maternité, vive la famille !