Paris propose à Moscou un «agenda de confiance»
Les ministres Jean-Yves Le Drian et Florence Parly ont évoqué lundi avec leurs homologues russes les mesures pour relancer la relation bilatérale.
La relance franco-russe a fait un nouveau pas, lundi à Moscou. Les ministres des Affaires étrangères et de la Défense des deux pays ne s’étaient pas vus depuis sept ans dans ce format appelé «2 + 2». Ces rencontres régulières organisées alternativement dans les deux capitales avaient été interrompues par la crise ukrainienne et l’annexion de la Crimée. «Le moment est venu de travailler à réduire la défiance» avec la Russie, a déclaré Jean-Yves Le Drian, aux côtés de Florence Parly et de leurs homologues, Sergueï Lavrov et Sergueï Choïgou. «Nous n’avons pas toujours la même vision», a dit de son côté la ministre. Mais «il est important de pouvoir se parler, d’éviter des incompréhensions, des frictions».
Dans ce nouveau contexte, la France a proposé à la Russie un «agenda de confiance et de sécurité» dans «cinq directions complémentaires» : coopération dans le domaine sécuritaire, culturel et le dialogue des sociétés civiles, création de mécanismes de concertation pour éviter tout incident (dans le domaine nucléaire, l’espace et le cyber), mise en place d’une «architecture de sécurité» en Europe, rapprochement des valeurs et des principes et travail commun face aux crises… «Vaste programme», aurait dit le général de Gaulle, dont la visite à Moscou en 1966 n’est pas oubliée.
Côté français, on ne mésestime pas l’ampleur des difficultés et le temps nécessaire. Des initiatives de diverses natures ont été évoquées pour «tourner la page d’une défiance stérile», selon les mots de Le Drian. Dans le domaine militaire, les deux pays travaillent à la «déconfliction» pour éviter tout incident entre forces navales en Méditerranée.
Par ailleurs, les commémorations du 75e anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale ouvrent un cycle mémoriel propice, qui verra Emmanuel Macron se rendre à Moscou le 9 mai prochain. Sergueï Choïgou a lancé une invitation à Florence Parly et évoqué la présence de militaires français sur la place Rouge à cette occasion. La ministre des Armées a offert à son homologue une photo de la célèbre escadrille de chasse Normandie-Niémen, emblématique de la lutte conjointe contre le nazisme. «Après les attentats de 2015, nos aviateurs en Syrie écrivaient “Pour Paris” sur les bombes qu’ils destinaient aux terroristes», a affirmé M. Choïgou.
Français et Russes sont entrés «dans le dur» des questions stratégiques, en évoquant l’«architecture européenne de sécurité», vieux serpent de mer dernièrement mis en exergue par Emmanuel Macron. Ce domaine, qui outrepasse la dimension bilatérale, est érigé en priorité par l’«érosion inquiétante des traités» (dernièrement le FNI, prochainement le Start) régissant la stabilité en Europe depuis la fin de la guerre froide. «Il faut relancer notre dialogue à ce sujet», a pressé Mme Parly.
Le dossier ukrainien reste majeur. «Aucun rapprochement durable ne se fera entre la France et la Russie sans progrès sur ce dossier», a prévenu Le Drian. «Le contexte actuel est favorable, plus qu’il ne l’a jamais été en trois ans», a dit le ministre, citant l’échange de prisonniers intervenu samedi entre Moscou et Kiev. Mais «ce n’est pas encore l’échéance de levée des sanctions», a rappelé le chef de la diplomatie française.
Source :Figaro