La ligne politique du président Hollande

24.04.2016

Comment peut-on savoir si on est de droite ou de gauche ? Pour les politiques de gauche la réponse est simple : si on est dans l’opposition on proteste contre toutes les mesures appliquées par le pouvoir de droite et au moment où on prend le pouvoir on passe à l’action le plus à droite possible. La France a vécu cela pendant le règne de François Mitterrand dans les années 1980 et elle le répète sous celui de François Hollande.

La promotion Voltaire de l’Ecole nationale de l’administration (ENA)

L'ENA a ouvert ses portes après la guerre pour compenser un certain manque de culture politique. Aujourd'hui, on y relève chez les élèves une absence totale d’expérience économique. On s’y trouve toujours au stade de Germinal. On y apprend bien à faire des discours mais il serait plus utile de faire faire aux élèves un stage dans une entreprise moyenne.

La promotion Voltaire (1978-1980) de l’ENA se nomme ainsi en hommage à ce grand philosophe pour marquer les 200 ans de sa mort (1778) en abandonnant la proposition de nom alternative, « Droits de l’Homme ».
Une promotion fertile qui a donné au pays des hommes et des femmes politiques de droite et de gauche dont le président François Hollande. La promotion Voltaire est tellement célèbre qu’en 2009 elle fait l’objet du téléfilm « L’école du pouvoir » qui raconte en mélangeant fiction et réalité, le début des parcours de François Hollande et de Ségolène Royal aux côtés de François Mitterrand où ils apprennent des leçons importantes. On y relève que  ni François Hollande, ni d’ailleurs Ségolène Royal, sa compagne à l’époque,  n’ont été de gauche. Pour Ségolène c’est très catégorique : elle n’a choisi la gauche en sortant de l’ENA qu’en fonction d’un plan de carrière car elle ne voyait pas comment «parvenir » en choisissant la droite. En 1979, ils adhèrent au Parti socialiste et, deux ans plus tard, François Mitterrand devient président.

En sautant une grande partie de la biographie de François Hollande, on se retrouve en 2002 quand il devient le chef du PS. Sous son règne le parti est devenu une aire de compétition pour candidats à la présidentielle. Pour les élections de 2007, c’était le tour de Ségolène Royal. Pour celles de 2012 celui de DSK mais il s’est fait piéger à New York et François Hollande, lui-même, est sorti de l’ombre de DSK et est devenu le président des Français.

Que faire

Chaque président veut être réélu pour un deuxième quinquennat. François Hollande est un bon élève de   François Mitterrand et il a retenu de la carrière politique de son mentor qu’un président ne se fait pas par la conviction de son propre camp. Pour rester à l’Elysée, au contraire, il faut s’efforcer d’incarner le pays tout entier.

Une fois choisi par son propre parti pour l’élection présidentielle, il peut être sûr d’avoir l’électorat de gauche dans sa poche, car malgré tout le mécontentement contre François Hollande, la gauche ne votera jamais à droite. On l’a déjà vu en 2012.

Il reste deux parties de l’électorat devant Hollande : la partie mécontente et la partie raisonnable. La majorité de la partie mécontente se trouve sous l’influence du FN de Marine Le Pen mais la partie raisonnable, autrement dit la « droite molle » qui n’osera pas voter trop ouvertement pour les extrêmes, peut être simplement  récupérée par François Hollande. Ni la droite ni le centre ne leur proposent rien de concret car pour l’instant eux-mêmes ne savent plus comment constituer une force d’opposition.

Pendant ses dernières apparitions publiques le président s’est recentré et ne declare plus : « Je suis socialiste » comme il l’a fait en 2013.En 1984 François Mitterrand a changé de Premier ministre en remplaçant Pierre Mauroy par  Laurent Fabius et a mis en œuvre la politique intérieure du « tournant de la rigueur ». En 2014 François Hollande s’est rapproché des libéraux Emmanuel Macron et Manuel Valls et….

Passons aux actes

Le mariage pour tous, la retraite à 60 ans pour les personnes ayant commencé à travailler tôt, la loi Alur sur le logement (détricotée depuis) resteront comme les seuls actes labellisés « de gauche » de son quinquennat.
Par contre, le fameux Pacte de responsabilité est le vrai symbole de la politique de l’offre mise en œuvre par l’équipe de François Hollande.  Sans doute c’est une véritable politique pro-business qui se trouve très éloignée des dogmes socialistes. Une politique qui est critiquée même par ses proches.   « François Hollande est le seul président de la Cinquième  République à avoir donné 40 milliards aux entreprises! », a proclamé l’avocat Dominique Villemot, son camarade de la promotion Voltaire de l’ENA.

« Jusqu'où ira-t-il ? » - se demande-t-on de plus en plus à gauche et à droite.

Plus le temps passe et plus le gouvernement de Manuel Valls adopte les représentations et les propositions de la droite. Ainsi le nouveau ministre du Travail Myriam El Khomri propose la dégressivité des allocations-chômage ! Mais c’est une idée traditionnelle du patronat et de la droite. En plus n’oublions pas les  reformes préconisées par le ministre de l’Economie Emmanuel Macron qui s’en prennent aux 35 heures car il veut diminuer le coût pour les entreprises. Sa loi « croissance et activité » est adoptée aux forceps de l’article 49.3 de la Constitution. Son véritable objectif de « libérer l’activité partout en France et dans tous les secteurs », notamment en permettant aux commerces d’ouvrir le dimanche. On peut être sûr que cette loi cache encore des surprises désagréables pour le peuple car son texte intégral de 300 articles n’était jamais publié ouvertement.
Triangulation - est un terme de science politique inventé par un conseiller de Bill Clinton dans les années 1990.

« Si un politique se trouve dans une opposition directe droite-gauche il doit prendre le meilleur de chaque position et faire semblant de générer une troisième position et comme cela le conflit se convertit en un triangle et déstabilise l’adversaire ».

L’équipe de François Hollande rejette toutes les suppositions qu’elle utilise cette méthode de triangulation et reprend certaines idées de l’adversaire pour élargir son assise électorale. En étant soumise à ce braconnage incessant sur ses terres, la droite ne sait plus comment s’opposer à la gauche. Nicolas Sarkozy, président des Républicains fut piqué au vif par la proposition de la gauche de dégressivité des allocations car il avait bien l’intention de s’exprimer sur l’assurance-chômage. Le dernier vestige à droite reste la déchéance de nationalité pour les terroristes. C’est une mesure proposée par Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen au lendemain du 13 novembre, reprise dans l’émotion post-attentats par François Hollande mais par la suite abandonnée piteusement après de nombreuses péripéties.

Voici donc la nouvelle stratégie politique de François Hollande qui nous montre bien que  le président ne croit plus aux additions et aux parts de marché dans la politique actuelle, et qu’il considère qu’il y a un seul moyen d’arriver à l’Elysée qui est de créer une offre politique qui transcende le clivage droite-gauche. Il pense qu’une partie de la gauche ne suivra pas, et il en a déjà fait son deuil. Il s’adresse aux Français, pas à la gauche, et essaie de faire semblant de créer son propre vent, sa propre dynamique, car il ne veut pas qu’elle dépende des autres. Mais pour l’instant son virage politique n’a pas été apprécié par la majorité du peuple car selon les sondages il serait battu au premier tour de l’élection présidentielle.